Rachel Carson, biologiste marine et militante écologiste américaine, fut pour ainsi dire une lanceuse d’alerte contre les intrants chimiques et pour la protection de la nature. A travers ses écrits elle a inspiré des politiques, des chercheurs, des associations qui poursuivent aujourd’hui son combat.
“Un large éventail de produits chimiques fabriqués par l'homme perturbent les délicats systèmes hormonaux” dénonce Theo Colborne, zoologiste et épidémiologiste, théoricienne des perturbateurs endocriniens, dans “Our Stolen Future” ou “Notre Avenir Volé”. Elle décrit que “ces systèmes jouent un rôle critique dans des processus allant du développement sexuel humain au comportement, à l'intelligence et au fonctionnement du système immunitaire.”
Suite à ce travail naît la conférence de Wingspread en 1991. “C'est au cours de ce colloque qu'est progressivement apparue l'idée que l'ensemble de ces phénomènes dus à différentes substances relevaient d'un même mécanisme, l'action mimétique des hormones naturelles par des produits chimiques présents dans l'environnement et conduisant à des perturbations.”
Le combat contre ces produits chimiques est toujours d’actualité à travers l’action de l’association Réseau Environnement Santé (RES) et de son président André Cicolella, chimiste, toxicologue et chercheur en santé environnementale. RES propose, conjointement avec la ville de Grenoble, un GIEC de la santé environnementale.
DHT, DDT, phtalate, métaux, plomb, pesticides, tous ces produits chimiques polluent toujours notre environnement (jouets, alimentation, urbanisme) et sont ceux contre lesquels veut lutter “L’appel de Grenoble”, manifeste signé par des scientifiques, élus et associations le 19 mars dernier à Grenoble. Tous appellent à la création d’un GIEC de la santé environnementale, “l’environnement étant entendu de façon large, incluant notamment les dimensions de l’alimentation, la ville et l'urbanisme et les aspects socioéconomiques”.
“Le GIEC est un regroupement d'experts qui travaillent sur le climat. Nous voulons faire de même en regroupant des travaux issus de toxicologie, de sciences sociales. Ce travail sera ainsi destiné aux décideurs publics.” explique Nicolas Namur, chargé de plaidoyer pour l’association.
Les maladies chroniques sont un véritable fléau. Elles représentent 2⁄3 des dépenses de santé, c’est dire leur importance. “Aujourd’hui, on sait que cela est d’origine environnementale" poursuit Nicolas Namur. Mais le point fondamental apparaît durant la crise sanitaire : “Pour Richard Horton, le rédacteur en chef de la revue scientifique The Lancet, cette pandémie était en réalité une syndémie. c’est-à-dire une synthèse de plusieurs pandémies, des épidémies de maladies chroniques. Aujourd’hui il y a peu de recherches interdisciplinaires et donc pas de résultats sur les conséquences des effets cocktails. C’est là tout l’objet de notre manifeste : être entendu.”
Le travail initié par Rachel Carlson, sur les pesticides, poursuit sa route. La grande dame serait fière de la relève.