Ils étaient près d'une trentaine dans la salle de l’aiguillage de la BIFURK le vendredi 16 septembre à réfléchir sur le thème “ Comment penser et faire de l'emploi de qualité dans l’ESS ?” Cette table ronde, visant à mettre à jour les tensions et contradictions qui traversent diverses organisations coopératives et associatives, pour d'une part analyser les modes de dépassement recherchés par les acteurs, d'autre part questionner l'évolution générale du sens et du rapport au travail. L'atelier s’est déroulé simultanément aux autres tables rondes organisées dans les différentes salles de la Bifurk dans le cadre de l’université de l’ESS 2022. La table ronde était animée par Philippe URVOA de Dédale, emploi social et solidaire et co-animée par Marion Saint Romain, des Échelles. Elle a connu trois temps forts : témoignages, ateliers en petit groupe et la plénière de restitution.
Témoignages
Trois structures de l’ESS, notamment Cabestan, Cultures du Cœur 38 et l'UNA Isère ont partagé, tour à tour, leurs expériences et leurs pratiques sur la qualité de l’emploi. Les intervenant.e.s ont évoqué, chacun selon la taille de sa structure, les problématiques et les enjeux liés aux 4 dimensions pour parler de la qualité de l’emploi dans l’ESS. Ils ont par ailleurs fait part des solutions proposées pour faire face aux difficultés rencontrées.
Cultures du cœur 38 est une structure de l’ESS de petite taille qui défend le droit à la culture pour tous et lutte contre l'exclusion sociale en favorisant la fréquentation des lieux culturels et sportifs depuis plus d’une dizaine d’années. Lors de son témoignage, Simone BRANON, présidente de cette association, a évoqué le financement comme un des facteurs majeurs de perte de pérennité des salariés dans les petites structures. “Lorsqu’il n'y a pas de financement pérenne ni de subventions, il est difficile de recruter ou de fidéliser des salariés selon ses besoins.” D’où la précarité des contrats, l'isolement, les tensions dans la relation employeur- salarié, car il est parfois difficile de préciser toutes les tâches liées au poste lors du recrutement.” L'intervenante a également partagé quelques solutions testées pour pallier à cette difficulté telles que le recours au contrat aidé, le recours au service civique, la proposition de postes à temps partiel, etc. Pour Simone BRANON, il y a de quoi s’interroger sur le sens du travail dans l’ESS. Faut-il revoir le mode de gouvernance ? Revoir le statut juridique ?
Cabestan est une coopérative d'entrepreneurs du bâtiment rassemblant 250 professionnels et plus de 60 métiers en Auvergne‑Rhône‑Alpes. Jihane Zemmouri Rimaud, une des intervenantes, a partagé les difficultés rencontrées, liées au recrutement. En tant que structure rassemblant plusieurs entreprises aux activités diversifiées, les difficultés sont souvent liées au recrutement de l’équipe support. Car la création des postes dépend du nombre d’entrepreneurs adhérents dans l’association. Les recrutements sont parfois faits en urgence et ceci peut amener à des recrutements non qualitatifs. Comment trouver les profils qui correspondent à leur besoin? Comment arriver à une cohésion d’équipe ? Comment répondre au paradoxe du sens du travail ? Des solutions proposées sont l’anticipation des recrutements, la réorganisation de l’identification, la révision des projets,etc.
UNA Isère est un réseau regroupant plus de 800 structures prestataires de services à domicile et des services à la personne. Raphaël Thivillier a évoqué dans son intervention, la problématique du modèle de gouvernance de l’ESS. Les associations n’ayant pas un but lucratif sont souvent confrontées au problème de financement et cela est la base de la dégradation de la qualité de l’emploi. Pour lui, la politique joue sur le financement des associations. Les associations ne sont pas valorisées par les politiques et se pose souvent une question de rentabilité. Pour pallier cette problématique, ce réseau fait recours à la diversification ou la multiplication des projets en vue de garder les salariés. Il utilise le système de parrainage pour accompagner ses adhérents et tente de retravailler le suivi de la contractualisation. Pour sauver la qualité de l’emploi dans ses structures, le réseau signe le partenariat avec d’autres entreprises pour trouver des solutions à la mobilité, donner du pouvoir d'achat à ses salariés et met un accent particulier sur l’organisation managériale.
Ateliers en petit groupe
Après le partage des expériences et des pratiques par les témoignages, il était temps pour les participants de réfléchir sur les problématiques, les questionnements et les enjeux évoqués par les intervenants. De toutes ces réflexions, il ressort que le financement est la cause de la dégradation de la qualité de l’emploi dans l’ESS quelle que soit la taille de la structure. Il est important d’anticiper les situations pour la pérennité des salariés.
Annie KAWUSOKO M./ PEYA pour Alpes Solidaires